Un titre à rallonge pour un roman petit par la taille, immense par le brio. J’ai eu ma grande période
Japrisot vers 20 ans après la découverte d’Un
long dimanche de fiançailles, que notre Jeunet cinéaste a bien écorné dans
sa vision éternellement sépia et adoratrice du zoom à grande vitesse, en
offrant en plus le rôle titre à la Tautou dont la moue unique de film en film
est irritante ! Passons.
J’avais enchaîné avec La Passion des femmes, L’Eté meurtrier, tous de beaux romans,
puis La dame dans l’auto que j’avais
dévoré goulûment tant l’intrigue était riche de suspense et admirablement
ficelée. Quinze ans plus tard, retrouvant le petit bijou dans ma bibliothèque,
je me souvenais de la qualité du livre
mais pas bien de l’intrigue, figurez-vous. Et en effet, j’ai été encore cueillie
comme une parfaite débutante en pénétrant l’univers de la jolie et très myope
Dany Longo.
La dame dans
l’auto, c’est elle. Complexée par sa myopie qu’elle planque derrière une paire
de lunettes noires, elle travaille dans une agence de pub, un peu par
nécessité, un peu par lassitude… Sa vie n’est pas folichonne, pas de grand
amour à l’horizon ni de revenus suffisants pour la faire rêver et pourtant,
elle en a des rêves. Tellement qu’elle ment comme elle respire. Quand son
patron lui demande un vendredi soir de venir en urgence taper chez lui le
dernier projet client avant qu’il ne s’envole le lendemain pour Genève, c’est
la nouveauté qui se profile ; Dany devra donc rester dormir dans la maison familiale où elle retrouvera son
ancienne copine Anita qui elle – épouse du boss oblige – a vraiment réussi (je précède les féministes que cette dernière précision offusquerait : le roman se déroule dans les années 60 !).
C’est aussi une occasion à saisir pour satisfaire un chef qui lui donnait jusqu’ici
l’impression d’être transparente. Dany ne sait pas que cette courte soirée va
l’emmener bien au-delà du samedi matin et de Montmorency, au volant d’une
magnifique Thunderbird, jusque dans le Midi de la France. Singularité
supplémentaire de sa mission prolongée : partout où elle passe, on lui dit
l’avoir déjà vue et le souvenir qu’elle a laissé chaque fois derrière elle est
bien étrange. Est-ce possible d’arriver quelque part avant même d’être
parti ? De retrouver partout ses traces alors qu’on n’est jamais
venu ? Et d’avoir tué quelqu’un à 1000 kilomètres du
lieu où l’on se trouve ? De quoi faire penser à Dany qu’elle perd la
boule… à moins que la fieffée menteuse soit prise au piège des propres histoires
qu’elle se raconte? Ou encore qu'elle soit la victime d’une farce morbide ?
Classé dans la
catégorie polar et adapté à l’écran comme tous les romans de « l’usine à histoires » Japrisot, La dame dans
l’auto est un modèle de fiction très, très habile. On est tout aussi
dérouté que Dany Longo et on n’a qu’une hâte, parvenir au dénouement de ce road
movie à l’héroïne inquiétante. On tourne les pages aussi vite que les
kilomètres défilent au compteur de l’auto de Dany pour regretter ensuite l’avidité
avec laquelle on a lu les 300 pages : ben ouais, encore un roman culte
qu’on aura déjà lu ! A moins de s’y replonger une dizaine d’années plus
tard, c’est ça qui est bon avec les bouquins.
Tiens, salut Claire, je suis venue voir ton blog sur les conseils d'un ami commun ;) et je découvre des goûts parfois également en commun : Haneke, Saburo Teshigawara, et Sébastien Japrisot ! Moi aussi, j'ai eu ma période Sébastien Japrisot (bien que, bizarrement, je n'aie jamais vraiment accroché à "un long dimanche de fiançailles" - peut-être faudrait-il que je le relise car je ne m'en souviens plus guère, ayant évité la soupe "sépia" de Jeunet) ! As-tu vu le film tiré de "la dame dans l'auto..." ? Et surtout, as-tu lu "Piège pour Cendrillon", pour moi l'un des meilleurs Japrisot ?! :)
RépondreSupprimerA bientôt !