Parfois, un
film qui s’annonçait sérieux déclenche un rire auquel on ne s’attendait pas du
tout… Loin d’être une connaisseuse de l’œuvre de Jean-Claude Brisseau, je le
savais considéré comme un auteur qui avait signé des films intéressants comme De bruit et de fureur. J’avais pour ma
part le souvenir de Noce Blanche, qui
racontait avec une belle gravité les amours interdites entre un prof de lycée
et une élève pas si candide… La jeune fille que j’étais moi-même à l’époque
avait été un brin bousculée par l’histoire surtout que le prof était interprété
par Bruno Kremer, déjà bedonnant et le visage marqué de verrues pois chiches,
ce qui rendait les étreintes entre les deux personnages encore moins sexy…
Bref. Esthétisme mis à part, le film était un drame bien mené, juste, bien
interprété. Un bon film.
En découvrant A l’aventure, sorti en 2010, je m’attendais
à un film sans doute grave lui aussi, et peut-être axé cette fois sur un autre
sujet que les fantasmes sexuels de son réalisateur. C’était méconnaître un M.
Brisseau vieillissant… La première scène de A
l’aventure donne le ton, très « sitcom » : sur un banc de
square, 2 copines mangent leur sandwich. La première est grave, songeuse, comme
déconnectée des bavardages de la seconde qui lui reproche d’être « hyper
chiante en ce moment ». Intervient soudain un faux sage de la soixantaine,
chauffeur de taxi de son état, qui se met à philosopher sur le fait que les pub
pour la lingerie fine tâchent de rendre sexy les pièces de tissus qui ne sont
là que pour cacher nos 2 trous dégoûtants… Drôle de marche que celle du monde
qui vend du mensonge à tour de bras, n’est-ce pas ? La jeune fille grave
écoute, très concentrée, les propos du vieux réac, tandis que la bavarde
s’agace des portes ouvertes enfoncées par ce « clodo ». Elle finit par se lever pour retourner
travailler tandis que sa copine reste sur le banc et médite sur les codes qu’on
nous impose, la liberté avec laquelle nous devrions vivre, etc. Le soir même,
elle fait l’amour avec son compagnon sans plaisir, il se lève un peu plus tard
dans la nuit et la découvre dans le salon en train de se caresser avec
provocation. Elle lui confirme qu’elle est insatisfaite, qu’elle se caresse ainsi
tous les jours puisque qu’il ne lui fait plus rien. Pas content le petit
copain, il sort et la traite de pute.
Nous allons
alors suivre la grande aventure sexuelle – celle du titre du film –, que décide
de vivre la jeune femme. Elle plaque son homme, son boulot et décide de goûter
à tous les plaisirs qu’elle s’interdisait jusque là. Imaginez, c’est important,
des personnages aux allures de minets et minettes bien élevés, ayant fait des
études et tout, récitant des répliques très écrites avec aussi peu de naturel
que des apprentis comédiens qui se seraient leurrés sur leur vocation. Ces
dialogues très explicatifs sont l’occasion pour Brisseau de livrer une certaine
culture livresque tout comme des conclusions riches de poncifs sur la vie du
type « une fois qu’un couple vit ensemble, la routine s’installe et menace
le désir ». Ah ça, on apprend beaucoup de choses qu’on n’avait jamais entendues
nulle part ! Imaginez maintenant ce genre de répliques, nourries de
réflexions existentielles poussées, qui coexistent avec des scènes porno soft qui
visitent triolisme et sado-masochisme, le tout saupoudré d’un peu de mysticisme
puisque c’est sous hypnose que la belle trouvera le plaisir extrême. Un peu
comme si Hélène et ses garçons avaient débarqué sur la planète Sexe sans complexe.
Et bien le tout forme un mélange grotesque. On rit beaucoup et je ne crois pas
que ce soit le projet de Brisseau. Si j’ai décidé de parler de ce film ici,
c’est parce que son ridicule provient du sérieux avec lequel il ne traite que
de clichés. Quitte à faire de l’héroïne une jeunette en quête d’expériences
sexuelles, alors autant assumer sa naïveté et instaurer un point de vue qui
s’amuse de la situation. Sade le faisait très bien dans ses livres… Ou faire un
vrai film érotique qui ne s’encombre pas d’un scénario et enchaîne les scènes hot. C’est intéressant parfois de voir
des films ratés car ils permettent d’apprécier mieux encore ceux qui sont
réussis ! A voir à l’occasion, donc, rien que pour le plaisir de découvrir
comment, en se prenant très au sérieux, un film peut malgré lui être très
drôle. Même si c’est triste pour son auteur qu’on a connu plus talentueux.
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